La causalité, la rationalité sont des concepts particulièrement « occidentaux ». Inspirés par la science – sa démarche hypothético-déductive – ils permettent de penser l’ « origine » des phénomènes.
Pour Aristote, celle-ci se trouve dans la Vie, comme principe créateur, comme souffle créateur. Cette force, cet élan anime l’être humain, le rendant conscient non pas seulement d’exister mais d’être une « étincelle » de vie. Cette conscience l’engage : il compromettrait son humanité en se dispersant ou en « expérimentant » des comportements extrêmes. L’idée de « juste milieu » bien comprise lui sera alors précieuse pour le guider à exprimer son individualité, son « projet de vie ».
Le « juste milieu » pourrait être perçu comme un placebo fade ou faire penser à un compromis frileux entre excitation et apathie. Nullement compromis, nullement frileux, celui-ci est bien plus la vie même. Le courage en est un bon exemple : pour Aristote il est précisément le juste milieu entre témérité et lâcheté. Quand on est vivant, on agit sans se laisser arrêter par des difficultés ou des « obstacles » intérieurs. On peut avoir peur et renoncer : c’est la lâcheté. On peut être gonflé d’orgueil et défier l’adversité : c’est la témérité. Mais on peut avancer sans se laisser avaler par l’altérité et sans l’avaler non plus : c’est le courage, la force de vivre sans la folle peur qui paralyse ou la folle audace qui aveugle. Ce faisant, l’humanité se fortifie et, de ce point de vue, l’attitude du « juste milieu » requiert une force d’âme et une intelligence que la confiance en la Vie prodigue.
Une illustration “éloquente” peut se trouver dans le mythe d’Icare. Celui-ci, faisant fi des “mises en garde” de son père Dédale, s’enivre (!) de la liberté retrouvée, de voler tel un oiseau. Dans sa griserie, il en vient à oublier que ses “ailes” ne sont que des “prothèses” conçues pour quitter la prison du labyrinthe.